Le Concert Spirituel des Tuileries

Brève description
Première période : 1725-1727
Seconde période : 1728-1733
Troisième période : 1734-1748
Quatrième période : 1748-1754
Cinquième période : 1755-1762
Sixième période : 1762-1771
Septième période : 1771-1773
Huitième période : 1773-1777
Neuvième période : 1777-1790
Le fonctionnement

Brève description

Fondé par Anne Danican Philidor, le Concert Spirituel des Tuileries était une association de concerts publics parisiens. Philidor obtint le 22/01/1725 un privilège pour un établissement de concert public parisien sis Salle des Cent-Suisses - salle qui se trouvait dans le pavillon central du Palais des Tuileries, au premier étage.

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Première période : 1725-1727

Durant cette première période, Philidor eut l'autorisation d'organiser des concert par privilège royal, dans une salle prêtée par le roi lui-même. Il dut passer un contrat avec le directeur de l'Académie Royale de Musique, qui avait le monopole de musique sur Paris. Grâce à ce contrat, le Concert Spirituel obtenait l'autorisation de faire exécuter de la « musique de chapelle » sur les paroles latines et rien d'autre (donc pas de musique française, ni de paroles française).
De plus, les concerts ne doivent se dérouler uniquement que les jours où l'Académie Royale de Musique fait relâche (lors des fêtes religieuses).
Pour obtenir ce privilège doit payer une redevance à l'Académie Royale de Musique.
En 1727, le Concert Spirituel obtient l'autorisation de pouvoir, enfin, faire exécuter de la musique en langue française et en italienne.

Les programmes - de vingt à vingt cinq jours par an - présentent des motets à grand chœur - tels ceux de De Lalande - mais aussi de la musique instrumentale (suites, symphonies, concertos, symphonies concertantes, ouvertures.....).
Les artistes recrutés par le Concert Spirituel travaillent également pour l'Académie Royale d Musique et de Danse, dans les églises parisiennes, mais aussi chez le Fermier Général Le Riche de la Poupelinière. Peuvent également faire des récitals des artistes étrangers, de passage dans la capitale.

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Seconde période : 1728-1733

En 1728,c'est un ancien lieutenant d'infanterie qui prend la direction : Pierre Simart. Il est associé à Jean Joseph Mouret. L'établissement restant tributaire des décisions de l'Académie Royale de Musique, la situation financière de l'établissement est des plus précaires.

Les programmes changent quelque peu d'orientation, car Jean Joseph Mouret insiste sur la présence de musique profane telle la cantate. Quelques oeuvres de Rameau sont présentées.
De nouveaux artistes font leur apparition, tel Jelyotte.

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Troisième période : 1734-1748

Le Concert Spirituel tombe sous la coupe de l'Académie Royale de Musique, qui va dès à présent gérer l'administration. L'académie va confier la direction à jean Ferry Rebel et François Francoeur. Les concerts sont toujours aussi peu nombreux - soit vingt deux à vingt trois par an.

Au programme, les oeuvres françaises sont à l'honneur et obtiennent les faveurs du public. Les spectateurs peuvent ainsi apprécier, outre les compositions de Michel Richard de Lalande et Mouret, celles de Jean Joseph Cassanéa de Mondonville - qui présentera durant cette période pas loin de dix huit oeuvres -, de Michel Blavet et de Joseph Bodin de Boismortier. Quant aux artistes, nous pouvons remarquer la première apparition de Mademoiselle Marie Fel, ainsi que celle de François Gaviniès.

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Quatrième période : 1748-1754

Avec cette quatrième période, un nouveau contrat est signé entre la société de concerts et l'Académie Royale de Musique. La direction est offerte, pour une durée de quatorze ans, à Pancrace Royer - le Maître de Musique des Enfants de France. Lui sera associé Gabriel Capperan - « simple » Ordinaire de la Musique du Roi, mais aussi violon à l'orchestre de l'Académie Royale de Musique.
C'est l'époque des grands travaux. La salle est entièrement refaite et un orgue est installé (Chéron, Daquin, Jolage y feront leurs gammes).

Les concerts, dont le nombre augmente jusqu'à atteindre celui de trente deux prestations par an, délaisse le répertoire profane. Les spectateurs apprécient toujours les oeuvres de Michel Richard de Lalande. Mais celles de Jean Joseph Cassénéa de Mondonville prennent de plus en plus d'importance. Cette période est également celle de la révélation du Stabat Mater de Pergolese - oeuvre qui restera au programme jusqu'à la Révolution Française. D'autres compositeurs étrangers sont présents u programme : Pugnani, Stamitz.
A présent, les abonnés peuvent apprécier des chanteurs italiens (Albanese, Caffarelli), mais aussi l'école française de violon (l'Abbé, Canavas, Gaviniès...).
L'orchestre et le choeur deviennent conséquents :
- Orchestre : 16 violons, 2 altos, 6 violoncelles, 2 contrebasses, 5 flûtes et hautbois, 3 bassons, 1 trompette, 2 cors, des timbales et l'orgue, qui fait le continuo.
- Choeur : 7 hommes et 6 femmes qui forment le Premier dessus, 6 femmes pour le deuxième dessus, 6 hautes contre, 7 tailles, 5 basses tailles et 8 basses contre.

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Cinquième période : 1755-1762

Pancrace Royer décédé, c'est sa veuve qui prend les rênes de la société. Lui est adjoint Jean Joseph Cassanéa de Mondonville, qui dirige également l'orchestre.
Mondonville y règne en maître absolu et change la teneur des programmes.

Le motet français remporte un franc succès, ceux de Mondonville sont souvent à l'affiche. Mais de nouveaux compositeurs sont également joués : F.A. Danican Philidor, François Joseph Gossec, François Giroust.
Une nouvelle génération d'artistes apparaît : les violonistes Guénin, Bertheaume, les violoncellistes Duport, Janson, le flûtiste Taillart mais aussi le harpiste Hochbrucker.
Quant à l'orgue, il devient un instrument soliste et prend vie sous les doigts de Daquin et Balbastre.

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Sixième période : 1762-1771

C'est Antoine Dauvergne, Maître de Musique de la Chambre du roi, qui prend la direction. Son privilège courra pour neuf ans. Il est associé à Gabriel Capperan et Nicolas René Joliveau (secrétaire perpétuel de l'Académie Royale de Musique), mais l'association reste sous la coupe de l'académie Royale de Musique, dirigée à présent par Jean Ferry Rebel et François Francoeur. Par contre Jean Joseph Cassanéa de Mondonville quitte le Concert spirituel et reprends la totalité de son répertoire de motet. La baguette de chef est confiée à Gaviniès, qui est également premier violon.

Les programmes s'enrichissent par la présence de Dauvergne (qui compose spécialement pour le Concert Spirituel), Giroust, et bien d'autres.....
Les spectateurs peuvent apprécier le hautboïste Besozzi, le clarinettiste Beer, les cornistes Rodolphe et Spandau, les harpistes Hochbrucker et Petrini, ainsi que l'organiste Séjan, qui fait ainsi ses débuts.

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Septième période : 1771-1773

Cette période est l'une des plus difficile pour l'association.
Le privilège de concession pour neuf ans est cédé à Antoine Dauvergne et son adjoint Pierre Montan Berton. Mais les soucis financiers s'accumulent et nécessite une réduction des prestations. Pourtant quelques rénovations sont entreprises, notamment l'achat d'un nouvel orgue (ou plus exactement rachat, car il s'agit de l'orgue des Tuilerie).

Lors des séances, les abonnés l'école française de violon, au sommet de sa gloire, et les violoncellistes Duport et Janson.

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Huitième période : 1773-1777

C'est une grande période de prospérité. Gaviniès prend la direction, et il est associé à Simon Leduc et à François Joseph Gossec.

L'aisance financière aidant, les programmes sont plus nombreux et s'enrichissent d'oeuvres de compositeurs étrangers. l'heure de gloire des symphonies concertantes est arrivée : celle de Jean Baptiste Davaux et du Chevalier Boulogne de Saint George emportent de francs succès.
De nouveaux interprètes viennent renforcer les rangs. Il en est ainsi des flûtistes Ruault et Wunderlich et du corniste Punto.

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Neuvième période : 1777-1790

Durant cette dernière période la direction sera concédée à la haute contre Joseph Legros. Les tractations permettent à la nouvelle équipe dirigeante d'obtenir que la redevance soit calculée proportionnellement au montant des recettes. Le Concert Spirituel peut enfin respirer sur le plan financier. A cette même époque, la société déménage et part s'installer dans l'ancienne salle de la Comédie Française (l'ancienne salle des Machines, toujours au Palais des Tuileries).
Puis, en 1789, un nouveau déménagement mène le Concert Spirituel dans la salle du Théâtre des Italiens, puis à l'Opéra.
En 1790, ce sera la fermeture définitive.

Cette période présente des programmes très variés. Nous pouvons recenser pas moins de quatre vingt compositeurs nouveaux. De nouveaux types d'oeuvres apparaissent : le hiérodrame. C'est la période faste pour François Joseph Gossec, F.A. Danican Philidor, Pierre Montan Berton, François Devienne, Charles Joseph Le Sueur ou Nicolas Méhul. Les étrangers sont également à l'honneur. Ainsi on peut apprécier : Niccolo Piccinni et Giovanni Paisiello, Franz Joseph Haydn, Wolgang Amadeus Mozart ....
Les cantatrices, comme la Saint-Huberty, la Tody et la Mara, sont ovationnées et la virtuosité commence à faire son apparition avec notamment les violonistes Viotti et Kreutzer. C'est aussi l'âge d'or des instrumentistes à vent : le hautboïste François Alexandre Sallentin (dit Charonne), le flûtiste Jean Louis Tulou, le flûtiste François Devienne, le bassoniste Étienne Ozi, le clarinettiste Michel Yost, le clarinettiste Jean Xavier Lefèvre [ou Lefèbvre].

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Le Fonctionnement

Comme bon nombre d'entreprises de spectacle, durant l'Ancien régime, le Concert Spirituel reste soumis à la délivrance d'une autorisation de spectacle : la concession d'un privilège. Elle ne peut se faire au détriment du monopole détenu par l'Académie Royale de Musique. Le lieu sera donc prêté par le Royet l'autorisation délivrée par l'Académie. Mais, le Concert Spirituel est tout de même une entreprise privée, qui ne reçoit aucune subvention. Ce qui peut expliquer les nombreux problèmes de gestion qu’elle a pu rencontrer.

Au fil du temps, nous pouvons observer une diversification du public et, surtout, une augmentation de ses exigences. Il paie et désire obtenir satisfaction. Ainsi lors des dernières années de fonctionnement, nous sentons poindre ce besoin de virtuosité, qui sera la spécificité du XIXème siècle.

Le répertoire, nous avons pu le remarquer, est très varié : pas moins de 460 compositeurs différents ont été produits, et le Concert Spirituel a vu la création de 1 253 oeuvres. Tout cela au cours de ses soixante cinq années de fonctionnement.

Avec le Concert Spirituel, nous pouvons observer une évolution qui marquera la musique des siècles suivants : grâce à cette association, la musique religieuse sera laïcisée. En effet, plus besoin de se rendre à l'église pour entendre un motet ou un stabat mater, la salle de concert offre maintenant cette possibilité. Cette musique n'est donc plus directement lié au culte et à la pratique religieuse.
Nous observons le même phénomène avec l'orgue, qui sort des lieu de culte pour rejoindre les salle de concert et devenir un instrument où la virtuosité a également sa place.
En ce qui concerne la musique instrumentale, nous pouvons remarquer que les programmations du Concert Spirituel ont largement contribué à son épanouissement. Non seulement, de nouveaux compositeurs sont diffusés, mais de jeunes interprètes peuvent se produire sur scène, et des instruments récents - tel la clarinette - s'y faire connaître du grand public.
Grâce à l'oeuvre du Concert Spirituel, les musiques étrangères vont, également, être diffusées en France.

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©2000-2001 La Musique Française au XVIIIème siècle
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